La vie de Poilly-lez-Gien en 1930

Ce travail est l’oeuvre collective du Club de Poilly. Les témoignages écrits, fournis par les “anciens” ont été rassemblés et fondus dans un document unique, dont le pittoresque et la fraîcheur des éléments recueillis, ont été conservés.

1930 h250

 

Poilly est un petit bourg, construit à trois kilomètres de Gien, sur la rive gauche de la Loire, aux confins du Berry, en face de l’important centre de Gien qui s’étend sur la rive droite. En 1930 Gien était une sous-préfecture et n’est plus aujourd’hui qu’un chef-lieu de canton dans l’arrondissement de Montargis, mais, pour les habitants de Poilly, Gien reste toujours “la ville”.

 

On arrive à Poilly en passant sous l’imposant viaduc de la ligne de chemin de fer de Gien à Argent.

 

La commune a une superficie de 3320 hectares. Elle avait en 1930, 362 habitations et comptait 1216 habitants dont 279 groupés dans le “bourg” et 937 disséminés dans la campagne.

 

Le nom de Poilly voudrait dire “chaussée”. Les rivières “Notre Heure” et le “Rousson” traversent le pays. Nous avons notre château,”Marcault” et notre église coquette, aux jolis vitraux, détruits, hélas ! en 39-45, elle fut brûlée pendant les guerres de religion en 1567, relevée au XVIème siècle, prolongée et restaurée en 1815.


coffre

Au 19ème siècle, on découvrit dans le cimetière 14 sarcophages en pierre, quelques uns renfermaient des pièces de monnaie, des petites statues grossières et du charbon de bois mêlé aux ossements.

 

Notre commune a souffert gravement au cours des siècles, des inondations de la Loire. Celle de 1846 lui causa particulièrement des dommages préjudiciables. La terrible inondation de 1856 l’épargna, grâce à la prévoyante initiative du curé de l’époque, qui fit édifier une chaussée qui protégea le village.

 

La vie à Poilly était bien calme, pas encore de T.S.F. mais déjà le bourg avait la lumière électrique. Les gens se couchaient et se levaient tôt.

 

La population en 1930 était surtout composée de cultivateurs, maraîchers, quelques commerçants, artisans et ouvriers à la faïencerie de Gien.

 

La vie sociale, politique et administrative

 

En 1930, il existait l’arrondissement de Gien, le docteur Pierre DEZARNAULT était député et le conseiller général Mr Jean VILLEJEAN, pharmacien.

 

La municipalité était ainsi composée :

Maire : Mr Sylvain COUILLARD
Adjoint : Mr Anaclé BERNARDON
Conseillers municipaux :
Jules BENICHON
René REVERDY
Fernand BERTRAND
Victor DESNOUES
Gaston DUMAIS
Albert CHIGOT
Pierre FONTAINE
Victor POUPA
Amable GIRARD
Alphonse POIRIER

Les réunions municipales se faisaient dans la salle de la mairie, ainsi que les élections. Celles-ci donnaient lieu à des réjouissances, les élus devaient payer la galette et la boisson, et les non élus avaient souvent une belle veste sur un mannequin accroché à leurs portes, quand on ne leur faisait pas une chanson.

 

Un garde-champêtre, Mr Michaut, dit “le Père Lapin” faisait les annonces avec son tambour, il avait une énorme moustache et grondait si fort en roulant les yeux, que petits et grands évitaient d’avoir affaire à lui.

 

Il y avait aussi deux cantonniers. Le Père TURPIN avec sa casquette de ponts et chaussées, sa pelle et son balai, était le cantonnier de la route de Bourges. Dans les mauvais chemins, on rencontrait le Père PRIEUR avec sa carnassière et son grand parapluie bleu en bandoulière sur le dos. Il entretenait les chemins de commune avec les cailloux que les fermiers avaient amenés. Chaque année, en effet, les fermiers étaient obligés de rouler un certain nombre de mètre de cailloux pour la commune en guise de prestation, impôt qui, aujourd’hui s’acquitte en argent.

 

Un bureau de bienfaisance qui délivrait pendant l’hiver des bons de pain et de viande aux nombreuses familles et aux plus nécessiteux. Pas d’entraide sociale, une mutuelle agricole, je crois.

 

Le receveur des Postes était Mr André MARATTRA et la commune était desservie par deux facteurs, Emile TURPIN et BONGIBAULT. Celui qui venait, était très aimable mais il aimait son verre de rouge qu’on lui versait à chaque fois. Une personne du bourg portait les télégrammes, elle était prévenue par une sonnette reliée à la poste, et ce n’était pas drôle, quand il fallait aller de nuit, dans une ferme éloignée, et traverser des bois.

 

Quelques personnes recevaient “le petit Parisien” mais tout le monde allait le vendredi, chez Boulmier, acheter “l’indépendant de Gien” ou “L’avenir républicain” le journal du Docteur Dézarnault, notre député, très connu et estimé loin à la ronde. Le journal national le plus lu était : “Le Petit Parisien”.

 

Pas de perception, il fallait aller à Gien

 

Notre château “Marcault” était habité par son propriétaire, Monsieur Augustin Janson de Couêt. A l’époque, la propriété était vaste et employait pas mal de main d’oeuvre :

 

- Régisseur : Mr René CARRE
- Cocher puis chauffeur : Louis REBECHE dit “Cadet”
- Valet de chambre : Maxime PAUTRE
- Cuisinière, femme de ménage : Mme Juliette PAUTRE
- Lingère, repasseuse : Mme Thasilia CHOISEAU
- Basse-courière : Mme Hélène REBECHE
- 1er jardinier : Hyppolite FRELAT
- 2ème jardinier : LAILLETTE
marcault

Quelques employés (hommes et femmes) étaient logés dans les communs et assuraient les travaux de la ferme. Les hommes faisaient la fenaison et la moisson à la faux, les femmes suivaient et faisaient les bottes de foin ou de grains, avec la faucille avant de les mettre en “cachons”. Il n’y avait aucune machine agricole à “Marcault”.

 

La lessive se faisait deux fois par an, on embauchait des femmes pendant une semaine, pour “couler” la lessive dans un grand cuvier, et ensuite rincer tout ce linge et ces draps au lavoir dans la propriété, près de la rivière.

Les châtelains avaient leur chapelle, à l’église, ils avaient leur entrée privée sur le coté.

 

La vie professionnelle

 

Voici les corps de métiers qui y sont représentés :

-Une scierie et scieur de long, (Mr Mentor THEBAULT)
-Deux charrons,
-Un menuisier,
-Deux rouliers en bois,
-Deux sabotiers,
-Deux maréchaux-ferrants,
-Un marchand de machines agricoles,
-Trois entrepreneurs de battage,
-Un marchand de cycles,
-Deux entrepreneurs de maçonnerie,
-Deux bouchers charcutiers,
-Un boulanger,
-Un horloger,
-Un tailleur d’habits,
-Une usine de poteaux électriques,
-Un dépôt d’essence,
-Neuf cafés épiciers,
-Huit jardiniers,
-Un horticulteur,
-Un fleuriste,
-Trois minotiers,
-Deux chiffonniers,
-Un coiffeur,
-Un transport déménagement,
-Un tabac,
-Un tailleur de pierres,
-Un marchand de vin en gros,
-Un architecte,
-Cinq couturières,
-Une brodeuse,
-Un marchand de cochons, Florian PIMPARET,
-Deux marchands de volailles, (STREICHER et BOUREUX)

Camille BOUREUX avait sa plumerie dans la cour, derrière la boulangerie. Quelques femmes plumaient, il fallait être bien habile pour gagner sa journée : elles étaient payées à la pièce et l’été, avec la chaleur et ... l’odeur, ce n’était pas agréable.

 

Deux boulangers venaient également, l’un de Gien, l’autre de St-Martin et vendaient à Poilly, leur pain de quatre livres, boulots ou fendus. Le mardi passait le boucher de Gien en patache aussi. La viande était toute découpée principalement du pot-au-feu et des ragoûts. Elle était placée sur de la paille recouverte d’un torchon blanc bien propre.

 

Il y avait encore trois moulins en activité, mais nous en avions huit. La faïencerie de Gien en possédait deux, pour le broyage de ses silex (autrefois).

 

Nous avions de temps en temps, la visite du père GALLEAU, bien connu dans toute la région, il vendait de la bonneterie, il avait une grande voiture bâchée noire et tirée par sa jument “Léone”. On trouvait de tout dans sa voiture, il lui fallait quelquefois longtemps pour trouver le caleçon ou le bonnet de coton mais il le trouvait. La marchandise du père GALLEAU était inusable.

 

Chaque année venait un auvergnat, Jean BOYER, dit “La Barbiche”, rémouleur, rétameur, plombier, etc...

 

Un bourrelier de Gien, Paul POUILLOT, passait régulièrement dans les fermes pour les réparations et restait quelquefois plusieurs jours, suivant ce qu’il y avait à faire.

 

Les épiciers ambulants avaient une voiture à cheval, il y avait moins de choix que maintenant. On achetait beaucoup de harengs saurs, pour les casse-croûtes du matin, quelquefois,

 

ces harengs avaient un goût de pétrole, la caissette voisinant avec les bidons, mais on n’était pas difficile.

 

“Le Planteur du Caïffa”, Monsieur JULIEN, venait de Gien lui aussi, avec sa voiture à âne.

 

La porteuse de pain avait une voiture à chien, son chien s’appelait “Chocolat”.

 

Il y avait enfin deux rouliers, Octave KAT, mutilé de guerre, très alerte malgré sa jambe de bois et André PRIEUR avec ces chevaux : Bijou et Suzanne.

 

De tous ces commerçants et artisans, il reste en 1980 :
- 1 entrepreneur de maçonnerie
- 1 boucher charcutier
- 1 boulanger
- l’usine de poteaux électriques
- 2 épiciers cafetiers (dont un avec tabac)
- 6 jardiniers
- 1 horticulteur
- 1 fleuriste
- 2 minotiers
- 1 coiffeur
- 1 marchand de vin.

Tous les autres ont disparu.



La vie à la campagne en 1930.

Au hasard d’une promenade, on pouvait voir une charrue tirée par des attelages de un, deux et même trois chevaux, selon l’importance de la ferme, la surface à cultiver et la dureté d’un sol plus ou moins calcaire.

 

On pouvait aussi assister au départ des vaches pour le pâturage, suivies d’un enfant et de un ou deux chiens, et au retour à l’étable à l’heure de la traite.

 

vache

La traite se faisait à la main, bien sûr, puis venait la transformation du lait avec l’écrémeuse qu’il fallait tourner à la main. Le barattage de la crème se faisait une fois par semaine et le beurre était vendu le lendemain au marché de Gien. La fabrication des fromages était réservée à la consommation familiale.

 

Dans plusieurs fermes de la commune, on élevait un troupeau de moutons. Cet élevage exigeait de vastes locaux ou bergeries, où vivaient 80 à 90 brebis reproductrices, que l’on tondaient en mai ou juin. Ce travail était celui de spécialistes qui venaient du Gâtinais. A deux ouvriers, il fallait deux jours. Ces hommes étaient nourris et logés à la ferme. Le produit de la tonte était vendu par des intermédiaires à la chambre de commerce du département.

 

De la Toussaint jusqu’en décembre et même en janvier, s’échelonnait l’agnelage. Chaque brebis donnait naissance à un agneau et souvent à deux : le premier-né était toujours le préféré, la mère refusait absolument le deuxième qu’il fallait allaiter comme un bébé avec beaucoup de patience. Lui donner le biberon était un surcroît de travail, mais combien agréable ! Ne dit-on pas “doux comme un agneau” !

 

Certaine allée qui partait d’une ferme et rejoignait la route était bordée de quelques 35 ou 36 noyers, le mois d’octobre venu, c’était la récolte des noix. A l’aide de longues perches, on gaulait les noyers et les noix tombaient en pluie. Après séchage et maturité complète des fruits, en novembre et décembre, à la veillée, sous la lampe à pétrole, on décortiquait les noix, tout le monde y prenait part et les bons mots, les devinettes, les potins du jour, les histoires de revenants, de birettes, tout y passait ! On ne s’ennuyait pas, c’était la radio et la télévision de l’époque ! Quand tout était terminé, et après rendez-vous avec le propriétaire d’un pressoir, on avait la provision d’huile pour l’année.

 

En toute saison on pouvait rencontrer sur les chemins, les traînards ou chemineaux, ces vieillards guenilleux, la besace sur le dos, qui, avant la nuit, demandaient asile dans les fermes, pour dormir dans la paille à l’abri d’une grange, bien contents s’ils pouvaient avoir une assiette de soupe chaude. Pour caution, ils devaient fournir leurs pièces d’identité qu’ils reprenaient le lendemain matin avec un quignon de pain et du lard, et en route pour une nouvelle journée “à la cloche”.

 

La vie à la ferme était rude, c’était le tout début des machines agricoles, on travaillait l’été de 4 heure du matin à 9 ou 10 heure du soir, et l’hiver de 5 heure à la nuit.

 

La traite des vaches demandait un bon moment et se renouvelait trois fois par jour.

 

L’hiver, les bêtes étaient soignées à l’écurie et nettoyées. Le fourrage et les betteraves que l’on minçait au coupe-racines, tout en tournant la manivelle, étaient l’essentiel de leur nourriture. On faisait cuire dans un grand fourneau des betteraves et des pommes de terre pour les cochons, et la buvée aux vaches. L’été, on conduisait les vaches aux prairies : c’était souvent l’occupation des gamins qui assuraient la garde.

 

Le travail des champs se faisait avec des chevaux, ce qui n’était guère avantageux. Pour les femmes, la vie dans les petites exploitations, était pénible car elles aidaient leur mari aux travaux des champs : au printemps, il fallait semer les légumes, les piocher, attacher la vigne, en été, ramasser le fourrage en cachons le rentrer, le mettre au grenier, ramasser les gerbes de blé en tériaux, les entasser dans les voitures et les mettre en meule.

 

La femme devait en plus faire la cuisine, le ménage, le lavage, s’occuper des enfants, les envoyer à l’école souvent distante de quatre ou cinq kilomètres, qu’il fallait faire à pied, en sabots ou en galoches, le panier d’une main et le sac de l’autre ou le sac au dos pour les garçons. Tous portaient le petit capuchon noir pour les garantir du froid ou de la pluie. Les plus éloignés venaient en voiture à chien et quelques “parvenus” à bicyclette. Ils apprenaient le dur travail de bonne heure.

 

Pendant les moissons, l’homme fauchait, la femme suivait derrière, et, à l’aide d’une faucille ramassait et formait des gerbes. Le travail était dur : le matin, dans les champs au lever du soleil, on était sur place, et, toute la journée, on allait le corps plié sur les gerbes. A midi, repas : la potée, les choux, le porc. A quatre heures, trempée, fromage blanc, et l’on reprenait le travail jusqu’au coucher du soleil. Dame, ce n’était pas la semaine de quarante heures ! ! ! et il faisait chaud ! ! !

 

Les femmes qui restaient à la maison pour élever les enfants, avaient quelquefois une vache et une chèvre ou deux. Celles qui n’avaient rien, allaient à la journée laver les lessives,. Les femmes travaillaient à la journée, aux travaux de couture, raccommodage, lessives, Les pauvres laveuses étaient bien à plaindre, il n’y avait pas d’eau courante : il fallait tirer l’eau du puits : frotter à la brosse et rincer à la rivière par n’importe quel temps et pousser une brouette de linge très lourde, très dur travail aussi.

 

lavoir

 

En ce temps-là, on ne connaissait pas les machines à laver. Les “lavandières” frottaient le linge sur une table, et dehors, hiver comme été, après, rinçage, à la rivière ou à la mare, à genoux dans un cabasson (caisse en bois garnie de paille). L’été, ça allait bien, mais l’hiver, il fallait souvent casser la glace. En tout temps, on avait le coeur gai, c’était la vie !

 

Maintenant les temps ont bien changé et c’est tant mieux ! On gagnait sa croûte comme ça, pour 1 Fr. 50 à 2 Frs par jour, et l’on se trouvait heureux ! ! !

 

Le samedi, c’était jour de marché pour volailles, lapins, beurre et oeufs que l’on apportait en patache. Tous les mois, il y avait la foire aux bestiaux. On amenait les cochons dans une cage dans la grande patache, que l’on appelait “cochonnière”, les vaches étaient attachées derrière la voiture, avec le veau dedans. La foire, c’était un peu la fête pour les fermiers : c’était un lieu de rencontre, ils mangeaient à l’auberge, les boulettes ou veau au vin et ils buvaient leur petit “canon” ce qui les mettait un peu en gaîté. Les communes voisines y venaient aussi nombreuses et en profitaient pour aller chez le notaire ou à la perception et aussi, surtout, jouer à la manille.

 

Les ouvriers agricoles, charretiers, valets, vachers, servantes, étaient engagés aux louées, qui avaient lieu à Gien à la St Jean le 24 juin et à la Toussaint.

 

Les battages

Quand les moissons étaient terminées, il fallait penser au battage du grain. A Poilly, il y avait quatre entrepreneurs de battage : THEBAULT, PAUTRAT, BEZARD et TRASBOT. Quand le cultivateur était prévenu que cela allait être son tour, il allait chercher la chaudière et la batteuse chez le fermier qui avait terminé son battage, il lui fallait trois chevaux pour tirer la batteuse et deux pour la machine.

 

battage

 

On mettait ce matériel près des meules qui avaient été faites au moment de la moisson. Le chauffeur était responsable de ces engins accompagnés d’un engreneur. La chaudière était allumée à quatre heures du matin. Les ouvriers qui suivaient la batteuse arrivaient à cinq heures et, après le café et la gnole (eau de vie) le chauffeur donnait un coup de sifflet et tout le monde se mettait au travail. Il y avait au moins douze ouvriers : sur les meules à défaire, sur la machine à battre, pour porter les sacs de grains au grenier, pour lier les bottes de paille, pour refaire les meules.

 

Vers 7 h 1/2 un coup de sifflet annonçait le petit déjeuner, copieux, mais il fallait qu’à 8 heures tout le monde soit à nouveau à la machine. A 10 heures, il y avait un arrêt pour le graissage. A midi, grand déjeuner avec une heure de sieste et à nouveau le travail, jusqu’à 19 ou 20 heures, cela pouvait durer plusieurs jours, suivant l’importance de la ferme. Il y avait un homme qui faisait le service d’eau : il allait au puit ou à la fosse, car la machine était à vapeur, et était chauffée au charbon.

 

La batteuse fonctionnait jusqu’au mois de décembre. Atteler à 5 heures du matin jusqu’à la nuit, c’était un rude labeur mais tous conservaient leur bonne humeur et leur gaîté. C’était aussi beaucoup de travail pour la fermière, car elle devait préparer les repas pour une quinzaine d’hommes qui avaient bon appétit et leur porter à boire pendant le travail.

 

Les vendanges

 

Tous les cultivateurs avaient leurs vignes, et même quelques particuliers. Quand on avait peu de vignes, la vendange se faisait le dimanche, chez d’autres, elle durait plusieurs jours.

 

On était dans les vignes à 8 heures et c’était bien pénible, il arrivait qu’il y avait du brouillard, voire même de la gelée. Il y avait deux vendangeurs par rang, avec chacun un seau. Quand le seau était plein, il fallait appeler le porteur, qui avait une hotte sur le dos. On y vidait le seau de raisin, et, quand le porteur avait sa hotte pleine, il allait décharger dans une tine (100 litres) et ensuite cette tine était versée dans la cuve (4000 litres - Mr PRIEUR).

 

A midi, on mangeait dans les vignes, avec des charcuteries, du fromage blanc, des fruits et de la boisson à volonté.

 

On se remettait vite au travail jusqu’au soir et, au retour à la maison, un grand repas attendait tout le monde. C’était la joie et, malgré la fatigue, l’entrain ne manquait pas.

 

Dans les vignes, les jeunes s’amusaient à se faire le “nez de vendange” en se barbouillant avec du raisin rouge.

 

On laissait cuver le vin une dizaine de jours, puis on allait chercher le pressoir, dans lequel le raisin était pressé pour faire sortir le reste du jus. C’était un pressoir à main et il fallait être deux ou trois pour l’utiliser. Ce pressoir appartenait à Mr BETAUD de St Martin et servait également pour faire le cidre après la récolte des pommes.

 

On gardait le marc de raisin ou de pommes, en prenant bien des précautions pour qu’il ne moisisse pas, et au cours de l’hiver, on le portait à l’alambic ambulant, qui venait sur la place de la Guinchère, afin de faire la “goutte” (eau-de-vie).

 

Après tous ces travaux, la vie était plus calme, on épandait le fumier dans les terres, avant les labours. On taillait les “bouchetures” le long des chemins et on allait couper du bois pour le chauffage. Il y avait les réparations, l’entretien des outils, et la préparation de la nourriture des bêtes qui restaient à l’étable.

 

Les ouvriers agricoles travaillaient à la coupe du bois de chauffage. Deux stères sur trois étaient réservés au patron qui payait la façon. Le troisième pouvait être vendu au marchand de bois.

 

Les informations et les communications

 

Il existait plusieurs routes départementales : une sur Orléans, une sur Châtillon sur Loire, la 140 qui traversait le pays et qui allait de Gien à Bourges, une sur Coullons et l’autre sur Autry le Chatel. Quant aux chemins, ils étaient tous en mauvais état.

 

Il y a 50 ans, la ligne de chemin de fer qui passe à Poillly, était encore en pleine activité. Sur la commune, il y avait en service à cette époque, la gare et trois passages à niveau gardés.

 

L’ensemble des employés S.N.C.F. se composait alors : du chef de gare qui était une femme, d’une équipe de quatre poseurs pour l’entretien de la voie et de deux gardes-barrière. Le plus fort des P.N. était celui qui se trouve à l’extrémité du bourg et la gardes-barrière assurait d’ailleurs le service pour les deux P.N. qui se trouvent à peu de distance l’un de l’autre, dont un avec des barrières et l’autre à bascule. Le petit train qui passait sur cette ligne “courte queue”, comme il était surnommé, faisait la liaison entre Gien et Argent en passant sur le viaduc (site de notre Giennois).

 

gare

Petit train de voyageurs et de marchandises à la fois, il comprenait une petite locomotive, deux wagons voyageurs, un wagon postal, un ou deux wagons marchandises selon les besoins et un wagon de queue où il y avait la messagerie et le chef de train.

 

Il y avait un wagon postal, car le courrier arrivait le matin au train de 7 h 20. deux facteurs l’attendaient, celui de Poilly (Mr. TURPIN ou Mr. BONGIBAULT) et celui de St Gondon ( Mr BOITIER) ce dernier venait à bicyclette, deux fois par jour pour l’arrivée et le départ du courrier de St Gondon. Il y avait une boite à lettres à la gare. La levée en était faite tous les soirs pour le train de 19 heures.

 

Ainsi, si nous manquions la levée de 18 heures à la poste, nous avions encore une heure pour porter notre courrier à la gare. C’était mieux qu’aujourd’hui, voyez-vous ! !

 

“Courte-Queue”, quatre jours par semaine, faisait la liaison, Gien-Argent, aller le matin de 7 h 10 et 10 h. et retour le soir, de 17 à 19 heures. les trois autres jours, c’est à dire les mardi, jeudi et samedi, il faisait un voyage supplémentaire l’après-midi de 13 h 30 à 15 heures. Le samedi soir il revenait à 21 heures faisant communication avec Bourges. Il était donc possible d’aller passer une journée à Bourges en partant le matin et en revenant le soir. C’était le seul moyen de locomotion qu’il y avait à cette époque ou alors il fallait passer par Nevers pour aller à Bourges.

 

Il y avait toujours des voyageurs, mais l’affluence était le samedi jour de marché à Gien. Les gens de Coullons et des Salons (Halte sur la ligne) prenait le train pour y venir. Les paniers et les cageots à deux oreilles (de lapins et de volailles) étaient mis aux bagages dans un wagon à l’arrière. Tout le monde descendait à Poilly et continuait à pied jusqu’à Gien avec son chargement.

 

La gare avait une assez grande activité et la femme qui assumait la fonction de chef de gare, n’était pas désoeuvrée. Toutes les marchandises nécessaires aux commerçants et artisans de Poilly, St Gondon et même Autry, arrivaient en gare de Poilly, ainsi, les cuisinières et les bicyclettes vendues par Mr PAPILLON, les barres de fer pour Mr BERNADON, les colis de tissu pour Mr JEAN le tailleur. Il n’y avait pas de livraison à domicile et chacun allait chercher ses colis avec une brouette, ou une voiture à bras, ou à cheval selon l’importance et le poids de la marchandise à emporter. La gare de marchandises avait aussi son trafic. On y voyait arriver et repartir des wagons plateaux de grumes et de planches,d’autres de blé, de farine pour les moulins et même les grosses futailles de vin pour les marchands en gros du Berry et de St Gondon, arrivaient en gare de Poilly.

 

vieux-viaduc

 

Il y avait le téléphone à la gare mais seulement pour le service, c’est à dire de gare en gare. Il n’était pas relié à la poste.

 

Il n’y avait pas l’électricité et l’éclairage intérieur comme extérieur se faisait au moyen de lampes à pétrole. D’ailleurs il y avait la lampisterie.

 

Enfin, “Courte-Queue” faisait partie de la vie quotidienne des habitants de Poilly. Qui ne se souvient du bruit que faisait le train en passant sur le pont de fer de la Loire ? On l’entendait de loin et bien des cultivateurs travaillant dans leurs champs, disaient, en l’entendant : “V’là l’train sur les ponts, il est 10 heures ou 5 heures”. Pour eux, c’était presque une horloge !

 

Mais on n’arrête pas le progrès et la route, avec l’automobile a tué notre petit train.

 

Et “Courte-Queue” n’existe plus ! ! !

 

Les distractions et les fêtes

 

Pas de théâtre, ni de cinéma, de temps en temps, un bal dans la salle BOULMIER. En fin d’année, le cercle de Mme ROLLAND (école communale) et le patronage Ste Thérèse, donnaient leurs séances récréatives.

 

Un cercle de jeunes donnait à l’époque, à la salle des fêtes, trois théâtres dans le courant de l’hiver, ce qui rassemblait deux cent cinquante personnes. Un autre cercle organisait des bals.

 

La plus grande fête de l’année, est celle du Lundi de Pâques, la fête des oeufs durs ; on y vient de loin voir la grande course cycliste, danser au bal LOISEAU. Puis il y a l’Ascension, la fête des ouvriers du bâtiment, fête foraine et aussi course à vélo, il y avait peu de chose mais tout le monde savait s’amuser. Les cultivateurs fêtent la St Eloi, les pompiers la Ste Barbe, les vignerons la St Vincent. A toutes ces occasions, il y avait une grand’messe suivi d’un banquet. Et sans oublier le muguet dans les bois !

 

En plus des sept cafés qu’il y avait dans le bourg, il y en avait quatre en campagne, fréquentés par les rouliers, les faïenciers, quelques copains qui se rencontraient, ils buvaient leur chopine, ou fillette, ou une cannette de bière. Souvent la salle commune servait de cuisine, de café et de chambre à coucher.

 

A la Vallée, il y avait Marguerite qui, en plus de son bistrot, avait trois vaches. Son mari faisait un peu de culture et en même temps, le roulier, bien qu’ayant une jambe de bois.

 

A la Ruellée, c’était chez Madame LETOURNEAU qu’on appelait “Petite Marie” car son mari s’appelait “Marie” et il était de petite taille. Plus loin c’était la mère THOMAS, très connue dans le coin pour son franc-parler. Le dimanche elle avait toujours des joueurs de cartes. La mère JULIEN se trouvait en bordure de la route de Coullons : elle vendait de l’épicerie. Son bistrot était fréquenté par les jeunes qui travaillaient dans les alentours.

 

Chaque mercredi où samedi, on se réunissait entre amis pour faire la belote ou la coinchée, ensuite on mangeait la galette et les beignets. Malgré les temps durs et le manque de confort on se trouvait heureux : ce n’était pas la vie mouvementée d’aujourd’hui ! ! !

 

La Saint-Cochon était aussi une petite fête entre parents et voisins, on tuait le cochon et les femmes devaient racler et laver les tripes. Avec le sang, on faisait du boudin qui cuisait dans la grande chaudière, qui servait à faire les pâtées aux bêtes, et qui était bien nettoyée pour cette occasion. La bête était découpée, et les morceaux de viande étaient mis dans de grands pots de grès parfumés à l’ail, dans la saumure, pour les repas d’hiver. Puis on faisait du fromage de tête, des pâtés, des boulettes, des andouilles, et, tout ce long travail terminé, c’était le repas et la détente, on mangeait toujours la soupe faite avec l’eau de cuisson du boudin, le boudin crû ou grillé, l’andouille grillée, la “fricassée”, le coeur, les poumons cuits au vin rouge. “La beurrée” (fromage blanc mou) avec oignon, poivre et fines herbes, et les fruits de la ferme. Tout cela arrosé du vin de la vigne sans oublier le café et la “goutte” (eau de vie de marc de raisin).

 

Le conseil de révision - Les conscrits de Poilly ! ! ! Quelle fête pour les “bons pour le service”. On partait tous ensembles, à pied, pour la mairie de Gien, où avait lieu la visite. On amenait Alphonse BOULMIER, le tambour du village, et, en avant, ran plan plan, à l’aller et au retour, sans oublier le drapeau, que l’on portait à tour de rôle ! ! !

 

Et le retour, c’était beau, on était fier et plein de décorations, rubans, cocardes sur les casquettes. Ah ! Ces décorations ! Il y avait des marchands près de mairie de Gien qui faisaient de grosses affaires ce jour là.

 

Les quelques “refusés” étaient un peu déçus, mais fêtaient quand même, pendant trois ou quatre jours, on mangeait les uns chez les autres, et on arrosait copieusement.

Les associations

caisse

Il n’y avait pas de société de musique, mais deux sociétés de tir, l’Eclaireur et l’Avant-garde, Association d’Anciens Combattants et de Sapeurs-pompiers

 

Il arrivait, c’était très rare heureusement, qu’un roulement de tambour alertât la population : c’était le garde-champêtre qui battait la générale, un incendie c’était déclaré quelque part dans la campagne, les pompiers s’attelaient à une pompe à bras et tous les habitants suivaient, il fallait faire la chaîne et souvent le point d’eau était loin du sinistre.

 

L'éducation

 

Il y avait quatre instituteurs, donc quatre classes assez aménagées à l’époque. Il y avait beaucoup de fréquentation, les enfants venaient de loin, parfois de quatre kilomètres du pays, bien souvent à pied, avec leurs paniers repas, car il n’y a pas de cantine. Les instituteurs étaient logés par la commune.

 

Il y avait trois écoles à Poilly en 1930 :


- Ecole des garçons : directeur, Mr. René GITTON
adjointe, Mme GITTON


- Ecole laïque fille : directrice : Melle Jeanne TOUSSAINT
adjointe, Melle Marie-Louise DURIF


- Nous avions une école libre pour filles :école Ste Thérèse :
directrice Melle Marie-Louise ECHARD
adjointe : Melle Cécilia MONGREDIEN

L’église

 

En 1930, l’église est très fréquentée à Poilly. Le curé CRESPEAU était assisté d’un bedeau, Ismaël JULIEN, qui était aussi horloger et distribuait chaque semaine le journal “La Croix”. Il existait un patronage avec salle où l’hiver, les jeunes du pays jouaient quelques pièces de théâtre.

 

eglise

 

Les premières communions sont de belles fêtes avec procession, cierges allumés, cantiques. Les familles étaient au grand complet et en grande toilette.

 

Les baptêmes étaient carillonnés à la volée, le parrain payait les cloches (1, 2, 3, ou 4 volées selon sa bourse) les volées étaient tirées avec une grosse corde par le bedeau et les enfants de chœur, leur grand amusement était de bien se tenir à la corde et de se laisser soulever à deux ou trois mètres en l’air. On les payait de dragées et de quelques pièces. La marraine payait les dragées et on les jetait par poignées aux enfants qui arrivaient en grand nombre dès qu’ils entendaient les cloches.

 

Mais les enfants naturels n’avaient pas droit aux cloches. Et les suicidés pas d’obsèques religieuses.

 

A cette époque et comme toujours, des habitants de la commune, de tous âges mouraient, la mort ne choisit pas !

 

Il y avait une prieuse d’enterrement pour le bourg, Adrienne ARNOULT, qui frappait à toutes les portes pour annoncer le jour et l’heure de obsèques du défunt, elle avait toujours son grand parapluie, un bonnet blanc ou un mouchoir à carreaux sur la tête et des grandes et large jupes avec un tablier très froncé à la taille. Pour la campagne, c’était Mr MORIN, dit “dévore-terre” parce qu’il marchait vite, je suppose.

 

Sous la pluie ou la neige, aussi sous un beau soleil, on pouvait suivre un long cortège, précédé du curé qui chantait les psaumes et les prières des morts et de deux enfants de choeurs, dont l’un portait la croix.

 

Derrière le corbillard, avant la famille, marchait “Drienne” la prieuse d’enterrement, qui portait un bol blanc rempli d’eau bénite, dans lequel trempaient plusieurs brins de buis, ceci pour bénir le corps du défunt avant sa mise en terre.

 

Le corbillard était conduit par le père PARCINEAU qui y attelait son cheval, aux sabots bien cirés pour la circonstance. Il y avait deux “cordons” de chaque coté du corbillard, tenus par quatre hommes ou femmes, voisins ou amis du défunt. Devant le cheval, marchaient le curé et deux enfants de choeur. Les remerciements de la famille se faisaient à la porte du cimetière.

 

Avant Pâques, les enfants de choeur allaient chez tous les habitants, ils chantaient des cantiques (O Crux Ave, Spes Unica) en échange, on leur donnait une pièce et dans les fermes on leur donnait des oeufs..

 

La Médecine et les soins

 

Il n’y a pas de docteur à Poilly. Pour tout, il fallait aller à Gien. Quand une femme allait avoir son bébé, il fallait “atteler” et partir chercher la sage-femme, tout se passait à la maison.

 

Bien des gens croyaient encore au pouvoir de certaines personnes qui “touchaient” : elles faisaient des signes et des prières à un saint ou une sainte suivant la maladie, la blessure, l’enflure, le mal aux dents, etc ... il paraît que c’était efficace et qu’il y avait de bons résultats ...

 

Les gens étaient encore très très crédules, on croyait aux jeteurs de sorts, aux birettes “ revenants”. Quand on avait un malade, on allait le faire “toucher” bien souvent chez CARREAU, le guérisseur de Coullons, ou on allait chez le rebouteux de Cernoy, LETOURNEAU dit “trois poils”, Il y avait aussi BLONDEAU à Coullons.

 

Ce travail est l’oeuvre collective du Club de Poilly. Les témoignages écrits, fournis par les “anciens” ont été rassemblés et fondus dans un document unique, dont le pittoresque et la fraîcheur des éléments recueillis, ont été conservés.

 

note

 

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